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Choisir ses mots pour lutter contre l’âgisme

Rédaction : Patrice Lehuede - Mise à jour : 26 mai 2020 à 08h27

Temps de lecture estimé à : moins d'une minute

Âgisme et choix des mots

Qu’il semble loin le temps où nos anciens étaient respectés et considérés comme vecteurs d’expérience, de savoir et de sagesse. Autrefois partie intégrante des sociétés traditionnelles, les personnes âgées se trouvent aujourd’hui très souvent exclues et isolées de la vie sociale. Ce rejet a un nom : on parle d’âgisme. Si les pouvoirs publics et les acteurs de la Silver économie semblent s’être saisis du problème, un long chemin reste toutefois à parcourir pour faire avancer les choses et pour changer les mentalités. Face à ce constat, quatre experts du grand âge suggèrent une nouvelle piste pour améliorer la représentation que l’on se fait des seniors : adopter un vocabulaire valorisant.

 

L’âgisme ou la discrimination liée à l’âge

Dans notre société consumériste qui assure une promotion permanente de la jeunesse, lui associant symboliquement les idées de beauté, de santé et de performance, vieillir se trouve inconsciemment rattaché aux concepts d’improductivité, de charge et de maladie. Dans ce contexte, avancer en âge peut rapidement se révéler anxiogène. On constate pourtant dans les faits que l’on vit plus longtemps et en bonne santé, tout en continuant très souvent à pratiquer une activité physique. Fondé sur des préjugés et des stéréotypes négatifs, l’âgisme conduit à l’instar du sexisme ou du racisme à du rejet et des discriminations. Ainsi nombre de personnes considèrent à tort que les seniors sont en mauvaise santé, ne maîtrisent pas les outils numériques, provoquent plus d’accidents de la route ou n’ont plus de vie sexuelle. Porté par tous les secteurs de la société –l’entreprise, les médias, la publicité, la médecine…–, ces idées reçues contribuent à la mise au ban de nos aînés. En témoigne le marché du travail difficilement accessible aux plus de 50 ans, mais aussi les difficultés pour contracter un crédit ou leur manque de représentativité dans les programmes télévisés.

Cet ostracisme s’accompagne d’un vocabulaire souvent péjoratif : dépendance, sénilité, vieux, déambuler, grabataire, prise en charge... Or, les mots sont porteurs de sens et concourent à dévaloriser et à stigmatiser les plus âgés. Plusieurs conséquences à ces discriminations pour les seniors. Isolement, perte de confiance en soi, exclusion sociale, frein à l’emploi, culpabilité, sentiment d’inutilité et d’être un poids pour une société qui caricature le vieillissement pour masquer sa propre peur de la mort. L’âgisme exerce ainsi des effets concrets sur la santé jusqu’à aboutir à un stress cardiovasculaire et à une espérance de vie réduite. Avec une population senior qui croît chaque année et devrait atteindre les 5 millions d’ici de 2040, il apparaît fondamental de proposer des solutions pour valoriser les plus âgés, chaque personne étant un senior en devenir.

 

L’importance du choix des mots

Outre l’éducation, l’évolution de la communication, l’expérimentation d’échanges intergénérationnels et de nécessaires réformes législatives, de nouvelles pistes sont proposées pour mieux intégrer les personnes âgées au sein de la société. Quatre professionnels du grand âge – Pascal Champvert, Président de l’AD-PA (Association des Directeurs au service des Personnes Agée), Claude Jeandel, gériatre, Philippe Denormandie, chirurgien neuro-orthopédique et Alain Koskas, Président de la FIAPA (Fédération internationale des associations de personnes âgées) tous deux membres du conseil scientifique du rapport Libault – préconisent ainsi un changement de la sémantique liée à l’âge. Parce que les mots sont porteurs de sens et de représentations, il leur apparaît crucial de choisir un vocabulaire bienveillant pour parler de et avec les personnes âgées. Il est ainsi nécessaire de remplacer certains termes connotés négativement et de leur trouver des équivalences positives.

Plusieurs exemples ont été proposés par les quatre personnalités. Ainsi on parlera de préférence de troubles neurocognitifs plutôt que de démence ou de sénilité, de soutien à domicile à la place de maintien à domicile, de personne vulnérable au lieu de personne dépendante, d’autonomie plutôt que de dépendance, de personne à mobilité réduite à la place de grabataire ou encore d’accompagnement en remplacement de prise en charge. L’objectif est d’abandonner des termes durs, parfois violents, envers les seniors et d’utiliser des mots porteurs d’une image positive afin de promouvoir une société respectueuse de chaque âge de la vie. De la même façon, certains paradigmes doivent évoluer. On se doit ainsi d’écouter et de prendre en compte les envies et les attentes des seniors et non pas simplement leur notifier ce qui semble le mieux pour eux.

Attendue à l’automne, la future loi Grand âge et autonomie devrait œuvrer pour une modification du vocabulaire relatif aux seniors. Reste aux professionnels du secteur à s’approprier ce jargon bienveillant et à l’intégrer dans leur communication afin de faire changer les mentalités et le regard porté sur les aînés.

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